Idir, de son vrai nom Hamid Cheriet, nĂ© en 1949 Ă AĂŻt LahcĂšne, Ă 35 km de Tizi-Ouzou, capitale de la Grande-Kabylie, rend hommage Ă son enfance. Avec le temps vient ce moment important oĂč lâon sent confusĂ©ment quâil faut faire le chemin Ă lâenvers pour se sentir totalement rassemblĂ©, unifiĂ©, pacifiĂ©. Les chansons populaires sont ainsi toutes les routes qui le ramĂšnent Ă son berceau de paix et dâidentitĂ©. GrĂące Ă ce disque, Idir opĂšre donc un pĂšlerinage musical, il nous donne une leçon et un bel exemple de ce que peut ĂȘtre lâouverture dans un monde oĂč tout semble ĂȘtre dĂ©terminĂ© par le dĂ©sir du repli. Deux mots qui ne vont pas bien ensembleâŠ.
Onze chansons qui Ćuvrent aussi, pour lui et pour nous-mĂȘmes, comme un remarquable travail de mĂ©moire. Idir, lĂ©gende de la chanson kabyle, se plie Ă lâexercice du duo pour nous faire Ă©couter un autre sens quâil donne Ă ce partage pourtant si commun dans la musique. Le plus difficile nâest pas dâĂȘtre invitĂ© Ă chanter avec autrui mais de se sentir admis comme un frĂšre. Et non plus comme un Ă©tranger que lâon accueille avec bienveillance.
Ce disque est composĂ© de chansons quâIdir a profondĂ©ment aimĂ©es dans son enfance puis dans sa vie dâartiste. Dâautres sont venues Ă lui comme de belles invitations Ă se ressembler. Un seul mot clĂ© pour comprendre le sens de ces adaptations : lâĂ©quivalence.
Equivalence dans le terrain contrastĂ© de lâĂ©motion, plus que dans la traque acharnĂ©e du sens premier. Ameziane Kezzar a ainsi menĂ© ce travail dâadaptation avec la complicitĂ© dâIdir. Car il ne fallait pas se risquer Ă simplement traduire, puisque câest souvent trahir. La vĂ©ritĂ© est toujours dans lâintelligence de lâĂ©motion. Et Ă lâĂ©coute des chansons, se dessine ainsi puissamment la personnalitĂ© de ce berger de la conscience. Le chant kabyle, de toute Ă©ternitĂ©, colle Ă la vie sociale. Il renvoie spontanĂ©ment Ă ces grandes et belles veillĂ©es oĂč lâon racontait le monde avec des contes et des Ă©nigmes.
Câest lâhistoire, lĂ encore, de lâenfant Idir qui Ă©coutait Ă©merveillĂ© sa grand-mĂšre et sa mĂšre poĂ©tesse lui enseigner la force vibrante de la culture orale et de la valeur unique du mot. Ce qui explique aussi le choix de ces onze chansons qui portent le texte trĂšs haut dans le ciel de notre exception culturelle. Car il nâest question que de cela dans ce disque Ă la fois bouleversant et revivifiant. Comme si, de lâexaltation de lâenfance, nous pouvions retrouver le chemin de lâespoir en passant par la beautĂ© de cette langue berbĂšre.